[Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.


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 [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.

Jin Ji
Eau calme
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Musique conseillée: Lustmord & Robert Rich — Hidden Refuge.

Pour une poignée d'amibes.

Les turbines d'aération résonnent dans les profondeurs des galeries souterraines. Un grondement sourd et lancinant amené par le souffle rance qui parcourt le sol. Assise en tailleur sur un tapis dont la poussière s'élève brassée par l'air chaud, Jin écoute les générateurs électrogènes tourner à plein régime derrière le battant en métal de l'échoppe.

Lorsqu'il n'y a pas de client, tout est calme. Ces grincements lointains, ces sirènes étouffées par les kilomètres de couloirs sombres, ces conversations basses et amoindries de l'autre côté des rideaux aux motifs couleur lait tourné, cela constitue l'univers de Jin. Une mélopée agréable qui la berce et l'endort, la rassure et la réconforte.

Un mouvement fugitif derrière la devanture —une simple toile de jute tendue entre deux poutres de bois affaissées— attire son attention. Elle dépose l'ardoise à côté de son genou, se redresse pour décaler la toile. Il n'y a personne, que le noir du couloir et le bourdonnement de l'atmosphère. Jin hausse les épaules, va pour se rasseoir. Elle s'arrête, se fige. Sur la table basse à côté de l'entrée trône une bouteille qu'elle n'a jamais vue. Plus qu'une bouteille, un bocal. Il est rempli d'une eau noirâtre étrange et une étiquette jaunît sur son couvercle.

Jin écarte son ardoise du pied, lance un regard dans les couloirs de la galerie. Un à gauche, un à droite. Le dépositaire a disparu. Elle étend les bras, se saisit du bocal et le ramène à elle avec précaution. Puis elle l'élève dans la lumière, pour en juger le contenu.

Il y flotte des dizaines de particules noires. Elles s'élèvent dans l'eau sale, gonflent, s'illuminent d'une couleur jaune un instant avant de redescendre le long des parois de verre. Jin incline la tête, fronce les sourcils. Cela ne ressemble à rien de ce qu'elle connaît. « Amibes mutées. » indique l'étiquette sur le couvercle. Jin pose sa main dessus, passe ses doigts sur les lettres, mais cette écriture en pattes de mouche ne lui rappelle rien ; elle ne connaît pas son auteur.

Le ballet continue dans un silence étrange. Les amibes montent et descendent dans le bocal, diffusant une lueur faible lorsqu'elles atteignent la surface de l'eau sombre. Jin retourne le bocal en maintenant fermement le couvercle. Le cycle se répète inlassablement, à peine troublé par le changement d'ordre. On dirait des lucioles, pense Jin.

« File-moi ça! »

Jin sursaute, manque d'échapper l'objet. La matriarche a surgi de la piaule derrière elle, les jambes écartées dans cette position qui signifie pour Jin qu'elle va prendre des coups si elle continue dans cette voie. Jin lui tend le bocal sans hésiter. La petite femme rondelette se précipite pour lui arracher des mains et s'en retourne derrière le battant, sans un autre mot.

Jin se rassoit. Elle reprend son ardoise, recommence ses gribouillis dans le calme. A quoi peuvent servir ses bestioles à la matriarche? En fait-elle commerce? Elle incline la tête tandis qu'elle réfléchit, attendant toujours un client avec patience.
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MessageSujet: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 2:40
Felice Agati
Attraente bastardo
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Pour une poignée d'amibes

Felice cheminait dans Shìchǎng. Ah, Shìchǎng... Son marché noir, son... Marché noir ? L'homme devait avouer qu'il n'avait jamais vraiment fait attention à ce qu'il pouvait y avoir d'autres dans ce quartier. Peut-être parce qu'à part de "jolies" habitations, il n'y avait pas grand chose d'autre ? Il ne savait pas. Et il n'avait réellement jugé bon de s'aventurer dans les ruelles les plus sombres de cet endroit, étrangement. Bien sûr, ce n'était pas Kollektor, mais... Bref.

Le but de ce trajet ? Non, cette fois il n'allait pas revendre à un prix plus cher quelques bouteilles en faisant croire qu'elles avaient quelque chose de plus - heureux les pigeons d'esprit - même si quelquefois c'était la vérité. Cette fois, il n'était pas le vendeur, mais l'acheteur d'un service bien trop rare. Il glissa sa main dans la poche intérieure de son blouson, vérifiant machinalement que le petit cahier était toujours là. Puis il tapota sa sacoche, où il avait tout de même glissé deux bouteilles d'alcool. Elles serviraient en tant que monnaie, ou bien il les revendraient sur le retour, pourquoi pas.

L'éducation. C'était peut-être la chose qui manquait le plus à Deadline. Certes, la plupart des enfants ayant encore leurs parents recevaient une éducation pour la vie de tous les jours, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Mais l'éducation de l'esprit ! Ah, leurs ancêtres auraient certainement pleuré en voyant ce qu'une partie de l'humanité était devenue. Heureusement pour lui, Felice avait eu la chance d'être élevé par une mère qui avait elle-même reçue une certaine éducation. Ainsi pouvait-elle écrire, lire et compter - ainsi que parler italien correctement même si cela ne servait plus à rien. Et lui avait hérité tant bien que mal de ce précieux savoir. Il avouait intérieurement avoir du mal avec les chiffres, mais comparé à bien d'autres...

Pourtant, Felice se rendait chez une scripte. L'utilité de ce geste aurait paru bien superflu à certains, cependant il jugeait cela nécessaire. Sa mère tenait bien les comptes, et il essayait parfois de le faire correctement, mais ce cahier avait besoin d'être vérifié. Peut-être y avait-il une erreur quelque part ? Il voulait en être sûr, pour ne pas perdre d'argent. Si là il payait la scripte, il croyait toutefois que sur le long terme cela rapporterait plus. Et si ce n'était pas le cas, et bien... Tant pis.

Il s'engagea dans une énième rue en évitant de bousculer un homme manifestement sous l'effet de la sarvose, et soutint le regarde d'un goliath qui semblait garder une porte et qui avait entreprit de le fixer le long de son parcours dans cette rue assez calme. Il lui sourit de façon neutre et s'arrêta en face un bâtiment adjacent. Normalement, c'était là. Il observa la toile de jute du plus bel effet en devanture et, alors qu'il entendait quelqu'un invectiver quelqu'un d'autre à l'intérieur, on lui agrippa l'épaule et le retourna. Il amorça donc le demi-tour tout étonné pour se retrouver face au goliath, qui voulait manifestement lui chercher des noises. Chose assez rare, cet asiatique était plus grand que lui et le toisait. Encore un qui n'avait pas grand chose dans la tête...

« C'était quoi ce sourire ? » lança-t-il en grognant presque.

Felice soupira subrepticement. Sérieusement ? Il avait bien envie de lui répondre de façon impolie mais ce n'était pas trop le moment de se bagarrer. Il se dégagea de la main toujours posée sur son épaule. Il ne cilla pas face à lui.

« C'était rien [bouffon]. J'avais juste envie de sourire parce que notre duel de regard était drôle. Maintenant, tu devrais retourner à ton poste avant d'avoir des problèmes... »

Cette dernière phrase eut pour effet qu'il se fasse bousculer en arrière.

« Me donne pas d'ordre, blanchette. »

Cependant, le gros lourdaud sembla trouver que ce n'était pas une mauvaise idée de retourner à sa place et laissa le natif d'Anayénnisi en paix. Ce dernier soupira légèrement et desserra ses poings qu'il avait par réflexe serrés en se faisant pousser en arrière et sans doute un peu plus en se faisant insulter. Mais ce n'était pas le moment, ni l'endroit, de se battre. Il finit donc par pousser la toile de jute et "entrer" dans le bâtiment. Il observa un instant la jeune femme agenouillée sur le sol en train de gribouiller sur une ardoise avant de sourire poliment et parler.

« Bonjour. C'est bien ici que je peux trouver Jin Ji ? »

C'était sans doute elle, et une fois de plus il avait le sentiment qu'elle était plus jeune que lui. Pourtant, pour cette fois, il aurait cru que ça aurait été une personne plus âgée.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 10:57
Jin Ji
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Un souffle rauque agite les cheveux de Jin dans son dos. Elle fronce les sourcils, observe la devanture. La toile de jute se balance. Des voix s'élèvent derrière.
Jin se prend à espérer l'apparition d'un second bocal. Elle tend le cou pour percevoir les conversations, saisir les silhouettes derrière le rideau.
La toile se décale, poussée par une main musclée. Jin sursaute, reprend sa position initiale, observant l'homme qui pénètre dans l'échoppe.
Un étranger. Caucasien. Voilà une bien étrange présence. Les cheveux noirs comme la pois, aussi sombres que ceux de Jin. Grand, robuste.
Jin incline la tête, sous le coup de la surprise. Elle ignore ce que peut bien amener un étranger jusqu'ici. Elle n'en a vu que peu, dans le passé. La matriarche ne les aime pas du tout, elle a chassé les deux derniers à coup de bâton.

« Bonjour. C'est bien ici que je peux trouver Jin Ji ? »

Jin reste inexpressive, mais sa gorge se serre. Les clients habituels ne la cherchent pas personnellement et ignorent son nom. Ils connaissent la matriarche — après tout, elle est censée savoir lire et écrire aussi. Jin, ce n'est que la devanture, la discrète adolescente qui aide aux tâches ingrates. Elle finit par déglutir et hocher la tête.

« Vous lui parlez. »

Elle chuchote et n'ajoute rien pour qu'il ne décèle pas le trouble dans sa voix ; elle lance un regard vers le battant en métal, espérant que la matriarche ne vienne pas couper court au dialogue. Jin veut en savoir plus. Est-ce lui qui a amené le bocal d'amibes? Elle repose l'ardoise et la craie entre ses genoux, joint les mains par-dessus et offre un sourire poli — et parfaitement faux — au client, puisque c'est ce qu'on attend d'elle.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 15:45
Felice Agati
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Pour une poignée d'amibes

Felice pestait encore intérieurement contre le goliath qui avait osé l'insulter. Mais se battre avec lui ne lui aurait pas profité. Et puis c'était en partie ce que l'autre recherchait, alors rien que pour ça il ne le ferait pas.

En écartant la toile utilisée comme porte et mur et se glissant derrière, il desserra la mâchoire pour accrocher un sourire poli à ses lèvres. Il lui demande ensuite s'il est au bon endroit en la détaillant. Il était presque sûr de l'avoir vu sursauter quand il est entré. Elle semble plutôt chétive et peu soignée. Une scripte serait vraiment dans un état pareil, avec un don si précieux ? Elle hocha la tête.

« Vous lui parlez. »

Autant pour lui. Il sourit un peu plus et s'approcha donc, observant la pièce. Cet endroit était aussi petit que la première salle de la distillerie... Mais plus "décoré".
Il reposa ses yeux sur la jeune femme et enleva son sac en bandoulière pour le poser délicatement à ses pieds. Il ne valait mieux pas casser les bouteilles...

« J'avais un peu peur de m'être planté d'endroit, c'est pas si facile à trouver... »

Il s'assit ensuite en face d'elle en glissant sa main dans sa poche intérieure pour en sortir le cahier, continuant sur sa lancée.

« Paraît que vous êtes douée pour les comptes, alors... Vous pourriez vérifier ce qu'il y a dans ceci s'il vous plait ? »

Il appuya la fin de sa phrase avec un nouveau sourire presque enjôleur en indiquant l'objet. Il la fixait toujours, sans détourner ses yeux des siens.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 16:23
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« J'avais un peu peur de m'être planté d'endroit, c'est pas si facile à trouver... »

Jin hoche la tête. Ce coin du district est un labyrinthe. Elle ne s'en sort pas toujours alors qu'elle y vit: mais elle passe peu de temps hors de l'échoppe, elle ne flâne certainement pas dans Shìchǎng. La matriarche la fouetterait si elle la savait à arpenter les couloirs sans son autorisation. Lorsque Jin doit porter un message ou aller lire des lettres aux habitants, elle se contraint au trajet le plus rapide et le plus droit. S'il lui arrivait le moindre ennui, elle doutait avoir un toit et un repas le soir. Elle serait sûrement jetée sur le béton de la galerie souterraine, avec pour seul bagage son vêtement.

Jin hoche la tête une fois de plus tandis que l'étranger s’assoit. Jin lisse la couche de vêtements rapiécés qu'elle porte, réflexe naturel en cas d'angoisse. Il est gigantesque par rapport à elle, même assis. Elle n'ose plus le regarder dans les yeux, maintenant qu'elle est consciente du rapport de force.

« Paraît que vous êtes douée pour les comptes, alors... Vous pourriez vérifier ce qu'il y a dans ceci s'il vous plait ? »

« Vous devez voir le paiement avec la matriarche (son regard dérive vers le battant en métal derrière lequel la vieille asiatique travaille, puis reporte son attention sur Felice). Ce que vous demandez peut prendre plusieurs heures. Vous pouvez nous confier l'objet de la correction et revenir plus tard, ou vous installer dans l'arrière-boutique si vous ne voulez pas perdre de vue vos possessions. »

Son ton est mécanique, froid, comme s'il s'agissait d'un discours appris par cœur et répété maintes fois. Jin hoche la tête pour conclure son monologue, les yeux fixés sur le tapis, puis indique « l'arrière boutique » du pouce. Il s'agit d'un renfoncement dans la paroi en béton, à côté de la porte de la salle des générateurs. Des coussins y sont étalés autour d'une lampe à huile antique, dont les parois sont blanchies par la poussière et la crasse.

Jin ramène son bras à sa position initiale et fixe l'étranger, attendant sa réponse. Elle imagine qu'il choisira de s'installer là, après avoir discuté avec la matriarche. Dans le cas où la matriarche ne le chasse pas. La plupart des hommes qui viennent demander des services ici, a remarqué Jin, n'ont aucune confiance en elle ou la matriarche. Seules les femmes semblent confier leurs affaires sans arrières-pensées. Elle ne comprend pas cette disparité entre les deux sexes: si elle est honnête avec elle-même, elle sait qu'elle n'aurait aucune confiance en la matriarche et choisirait de s'installer dans l'alcôve derrière. Elle s'assiérait en tailleur et observerait le dos de la scripte au travail, prenant soin de vérifier qu'elle ne froisserait pas les pages du journal, ou ne noterait rien de son contenu à côté.

« Est-ce la seule chose dont vous souhaitez la vérification ? » s'enquit Jin en fixant le carnet du regard. S'il est rempli uniquement d'opérations, Jin risque de mettre plusieurs jours à le feuilleter d'un bout à l'autre. Elle se garde bien de le dire: c'est le rôle de la matriarche que d'exposer les conditions de la correction.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 16:54
Felice Agati
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Pour une poignée d'amibes

L'infecté avait capté du regard le petit geste significatif que la jeune femme fit. Et bien quoi ? Il lui faisait peur ? Voilà qu'elle ne le regardait même plus et fixait le tapis devant elle. Il eut l'air amusé quelques instants puis reprit un air plus neutre, gardant un petit sourire au coin des lèvres.

« Vous devez voir le paiement avec la matriarche (son regard dérive vers le battant en métal derrière lequel la vieille asiatique travaille, puis reporte son attention sur Felice). Ce que vous demandez peut prendre plusieurs heures. Vous pouvez nous confier l'objet de la correction et revenir plus tard, ou vous installer dans l'arrière-boutique si vous ne voulez pas perdre de vue vos possessions. »

"Woh." C'est le premier truc qui vint à l'esprit de Felice après cette longue tirade. Elle avait dit tout ça sur un ton si monotone, si froid, presque lointain. Même lui, qui répétait assez souvent les mêmes choses à la distillerie, s'efforçait de varier ses tournures de phrase. Ce serait bien ennuyeux sinon. Effaçant son air quelque peu perplexe, il parla sur le ton de la plaisanterie.

« Je ne savais pas qu'il y avait des robots par ici... Vous avez dû le dire un certain nombre de fois pour en venir à le dire comme ça. »

Il espérait qu'elle ne le prendrait pas mal, il voulait juste voir s'il pouvait lui arracher un sourire et la rassurer un peu, puisqu'il avait l'impression qu'elle était intimidée. Il détacha finalement ses yeux d'elle pour les poser sur "l'arrière-boutique", remarquant que ça avait plutôt l'air confortable. Il s'y installerait sans doute un moment. Peut-être même qu'il s'y assoupirait, vu comment il dormait mal ces derniers temps. Il reposa son regard sur la frêle asiatique lorsqu'elle reprit la parole, revenant à l'instant présent.

« Est-ce la seule chose dont vous souhaitez la vérification ? »

Il hocha doucement la tête en souriant une fois de plus, complétant son geste par ses dires.

« Oui, merci. »

Il se redressa en empoignant la lanière de son sac et en gardant le cahier en main. Il s'approcha du battant métallique et le poussa, passant dans l'autre pièce. Il se retrouva donc face à face avec la charmante tenancière du lieu et la salua, puis il expliqua avec concision sa venue, et surtout son paiement. Il glissa le support d'écriture dans le sac pour en sortant avec habileté une bouteille d'alcool, se gardant bien de montrer la seconde. Il esquissa un sourire et n'eut pas à lutter pour que l'échange soit accepté. Qui ne cédait pas à l'alcool Agati ? Pas grand monde, il le savait bien. Et c'était très bien comme ça, n'est-ce pas ?

Felice laissa la femme avec sa bouteille et retourna dans l'autre pièce, se baissant vers la petite scripte en sortant "l'objet de la correction" pour lui tendre avec un sourire.

« Ça ne devrait pas être trop long ni difficile... »

Il s'écarta assez vite, pensant qu'en la surplombant ainsi il l'intimiderait à nouveau, et ce n'est pas vraiment ce qu'il voulait. Il dansait un instant sur ses pieds puis se dirigea vers les coussins, faisant en sorte d'être allongé dessus mais avec le buste assez haut pour pouvoir observer la jeune femme.
Le petit cahier n'avait pas tant de pages manuscrites que ça. Une quinzaine tout au plus. Mais l'écriture était plutôt petite, puisque les Agati essayait d'économiser le papier. Il contenait donc les façons de payer de chaque client, son équivalent en vieux dollar, si rare à cette époque, et les sous-totaux de gain pour chaque journée. Ah, les joies des comptes.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 18:04
Jin Ji
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« Je ne savais pas qu'il y avait des robots par ici... Vous avez dû le dire un certain nombre de fois pour en venir à le dire comme ça. »

Jin ignore la remarque. Que pourrait-elle faire d'autre? Sa réaction risquerait de froisser le client, alors elle reste muette et impassible. Elle se décale sur son tapis pour laisser passer l'homme tandis qu'il se relève et l'observe de dos lorsqu'il va déranger la matriarche. Il pourrait la broyer d'un geste de la main, comme tous ceux qui viennent ici. Il n'en fera rien. Même les plus énervés n'osent pas lever la main sur la matriarche. Jin ne comprend pas pourquoi. La peur des représailles? Il est vrai que le quartier aime bien la matriarche. Elle est difficile en affaire et bougonne, mais ses conseils sont bons et ses connaissances variées. Lui faire du mal reviendrait à se mettre beaucoup de gens à dos, mais les étrangers ne savent pas ça.

Jin ne lui ferait jamais du mal. Elle est sa bienfaitrice, celle qui l'a recueillie et l'a aidée alors qu'elle n'était qu'une enfant. Elle n'est pas agréable à vivre, mais cela reste ce qu'elle a de plus près d'une mère.

Jin reprend sa place alors que l'homme discute avec la matriarche. Comme elle ne perçoit aucun cri, elle suppose que cela se déroule bien. Elle saisit son ardoise et l'efface avec sa manche. Voilà qui lui servira pour ses calculs, se dit-elle avant de frotter ses yeux. Après cette tâche, il lui faudra faire la cuisine. Elle laisse échapper un soupire tandis que le client revient.

« Ça ne devrait pas être trop long ni difficile... »

Jin saisit le carnet d'une main mal assurée, puis le dépose entre ses genoux, sur l'ardoise. Elle l'ouvre, feuillette les premières pages, observe l'écriture en plissant les yeux puis hoche la tête. Elle redresse ensuite le menton, cherche l'homme du regard. Il s'est installé sur les coussins, comme les autres. Elle lui sourit, de son air froid et distant, puis élève la voix de son ton cristallin:

« Voulez-vous que j'indique les corrections à réaliser dans la marge, au crayon, afin que vous puissiez vérifier de nouveau par vous-même, ou souhaitez-vous que je les réalise directement ? »

La question n'est pas dans l'intérêt du client, Jin le sait. La matriarche lui demandera ensuite quel choix a-t-il fait: la vérité est qu'elle liste tous ceux qui savent lire et écrire. Ceux qui autorisent les corrections au crayon et vérifient ensuite sur place, la matriarche note leur apparence, si possible leur nom. Ceux qui ne savent pas lire et écrire se contentent de la seconde option, sauf dans le cas où ils ne sont là qu'en tant que seconde main. La matriarche ne s'y intéresse pas, ils ne valent pas son temps.

Jin préfère ceux qui demandent les corrections au crayon. Elle admire leur prudence et leur éducation. A voir le gabarit de l'homme, elle doute qu'il soit de cette catégorie. Son travail doit être de battre des bougres au fond de caves dans le but d'obtenir des aveux « spontanés ». Peut-être même porte-t-il...

Jin écarquille les yeux. Elle serre l'ardoise et le carnet avec un peu plus de force, essayant de chasser la pensée. Il n'a pas d'arme, non, il n'a pas d'arme, se répète-elle mentalement. Elle lui lance un regard en biais, tandis que son sourire s'est effacé, puis fixe le cahier sans un mot. Il est juste là pour ses corrections, il n'a pas d'arme, il ne te veut rien de mal et c'est un client à qui tu dois le respect, essaye de se convaincre Jin. Elle ouvre le carnet à la première page, dirigeant sa concentration sur les opérations.

L'auteur ramène le troc à des expressions numériques. Jin hoche la tête, saisissant la manière de procéder qu'elle trouve intelligente et surtout, simple pour elle. Elle suit d'un doigt tremblant chaque opération, commençant à compter méthodiquement, sans utiliser son ardoise pour le moment.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptySam 29 Aoû - 19:18
Felice Agati
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Apparemment, elle avait mal pris sa tentative d'humour, vue qu'elle était restée aussi froide qu'auparavant. Felice perdit son sourire en se relevant pour aller parler à l'autre femme. Heureusement que le service était réellement requis, parce qu'avec si peu de la chaleur humaine, les clients n'étaient pas gagnés... Mais le contact qui lui avait filé l'adresse l'avait assuré de l'efficacité de ces dames, alors...

Il lui avait aussi dit que la matriarche était dure en affaires, cependant comme il avait de l'alcool c'était bien plus facile... Un jour, il avait essayé de trouver des slogans pour leur distillerie alors qu'il s'ennuyait, mais le résultat n'était pas merveilleux. "L'alcool Agati, l'alcool bon pour votre vie !" ou "L'alcool Agati, il est loin d'être tout pourri", c'était ridicule. Quand il y repensait, il se disait qu'il était fatigué quand il avait tenté de faire ça...

En se posant sur les coussins, il observa la jeune femme en train de commencer son travail. Il espérait que ça ne prendrait pas trop longtemps, il voulait rentrer pour l'heure du dîner. Alors qu'il commençait à vraiment détailler l'endroit du regard, il vit la scripte se tourner vers lui et lui demander une préférence.

« Voulez-vous que j'indique les corrections à réaliser dans la marge, au crayon, afin que vous puissiez vérifier de nouveau par vous-même, ou souhaitez-vous que je les réalise directement ? »

Il réfléchit un instant puis hocha la tête machinalement en répondant.

« On avait déjà fait les calculs mais on aurait peut-être dû les noter aussi... Écrivez-les, ça fera toujours une vérification de plus, merci. »

Il sourit légèrement. Il supposait qu'elle ne tarderait pas à s'apercevoir qu'il y avait deux écritures différentes dans ce cahier. Même pour les chiffres, c'était plutôt sa mère qui les avait écrit, elle l'avait presque forcé à en faire certains. Pour son bien soit disant. Elle avait sans doute raison.

Alors que la petite asiatique revenait à ses calculs, il ôta son blouson et le posa à côté de lui, prenant soin de ranger son pistolet dans son sac discrètement et en faisant attention qu'on ne le voyait pas faire, puisque l'arme à feu aurait été visible sans sa chaude veste pour le cachet. Si la jeune femme semblait un peu effrayée par sa stature, il ne voulait pas savoir comment elle réagirait si elle voyait qu'il avait une arme. Et il n'avait pas envie de se faire jeter dehors alors qu'il avait déjà payé.

Il s'installa donc confortablement et commença à attendre, observant la pièce puis la scripte au travail.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptyDim 30 Aoû - 2:29
Jin Ji
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Après une heure de travail silencieux, Jin relève la tête. Elle a passé au crible le carnet de bout en bout, deux fois de suite. Elle est certaine de n'avoir fait aucune erreur. Elle repose son crayon, souffle par réflexe sur ses annotations, vérifie que son écriture est lisible. Toutes en courbes et en creux, ses lettres sont discrètes et sages. Sur le papier légèrement jauni par le temps, elles semblent s’assagir dans les marges, paresseuses et douces. Jin est fière de sa façon de rédiger. Elle est douée de ses doigts.

L'adolescente referme le carnet, repousse son ardoise, brosse la couverture un instant avec la manche puis se retourne vers son client. Il s'est affalé dans les coussins depuis un moment, mais elle vient à peine de reprendre conscience de sa présence. Malgré sa crainte initiale, elle a réussi à se concentrer sur ses opérations et ignorer sa gorge serrée et son malaise. Elle l'observe en silence: dort-il? Comme elle ne parvient pas à le déterminer, elle chuchote dans sa direction.

« Monsieur? Mon travail est terminé. »

Mais avant que celui-ci ne puisse réagir, comme si la matriarche avait été invoquée pour l'occasion, le battant de métal s'ouvre et la vieille asiatique entre en coup de vent.

« Va porter ça à Sejui, vu que tu ne fais rien. Reviens avant une heure pour le dîner. »

Lorsque la matriarche parle, Jin a sans cesse l'impression d'un hurlement. Malgré sa petite taille, c'est une boule de nerfs à vif qui gesticule sans cesse. Elle n'a rien du calme de Jin. Campée sur ses jambes potelées, la matriarche tend le bocal noirâtre déposé tout à l'heure. Jin s'en saisit et hoche la tête. La matriarche ignore le client et disparaît dans son antre, non sans avoir adressé un regard noir d'impatience et de dégoût à Jin. Elle a appris à ne pas s'en formaliser: selon tous les voisins, c'est le seul regard dont elle est capable.

Sejui? Jin fouille dans sa mémoire. Rien ne lui vient. Elle ne connait personne de ce nom. Elle suppose que si la matriarche lui demande sans lui fournir d'explications, Jin pourra s'enquérir de son identité et de son adresse auprès de la milice du quartier. Elle les déteste, ils sentent mauvais la sueur poisseuse, portent des armes effrayantes et se moquent sans cesse d'elle ; mais leurs renseignements sont toujours bons. Puisqu'ils trafiquent avec tous les marchands du coin, ils savent qui est qui. Jin est persuadée qu'ils connaissent son nom à elle, peut-être même son âge et sans aucun doute son occupation, alors qu'elle ne leur a jamais donné ces informations.

Pensive, Jin fixe le bocal entre ses mains. Il n'y a plus de lucioles dedans, seulement de l'eau. Aucun mouvement, pas de couleurs, pas de lumières. Elle tire la moue, déçue. Les amibes constituaient un phénomène étrange et attrayant, un spectacle intime et relaxant. Elle incline la tête, reprenant conscience du fait que le cahier du client est toujours en sa possession. Elle dépose le bocal à ses pieds en soupirant, puis s'approche de l'homme pour lui tendre le carnet: il est désormais réveillé, avec l'interruption bruyante de sa « bienfaitrice ».

« Êtes-vous satisfait des corrections ? »

Son ton est de nouveau froid, automatique. Elle ne peut s'en empêcher, comme s'il s'agissait d'un mécanisme d'auto-défense naturel. Aussi régulièrement que bat son cœur, que s'élève et s'abaisse sa poitrine, ses paroles sont monotones.
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MessageSujet: Re: [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes.   [Octobre 2350] Pour une poignée d'amibes. EmptyDim 30 Aoû - 2:56
Felice Agati
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Pour une poignée d'amibes

Felice patientait, paisible. Cet endroit était tranquille... Calme. Il entendait par moment des voix étouffées venant de l'extérieur, mais le faible vrombissement des générateurs assez près de l’alcôve le berçait presque. Les bruits continus ne le dérangeaient pas pour se repose, c'était plutôt les petits bruits répétitifs qui captaient son attention et l'empêchait parfois de dormir. C'était d'ailleurs pour cette raison qu'il n'avait pas de réveil... Le "tic tic" incessant de l'aiguille l'ennuyait passablement.

Mais ici, il n'y avait pas ce genre de bruits. Alors après un moment à observer la jeune femme et écouter le léger crissement du crayon sur le papier, il ferma les yeux et se laissa aller entre deux mondes, celui du rêve et celui de la réalité. Il ne s'endormit pas vraiment, il restait dans cet entre-deux en attendant que la jeune femme termine son travail. Il l'entendit d'ailleurs bouger et même lui parler tout bas.

« Monsieur? Mon travail est terminé. »

Il ouvrit donc les yeux, dans la même seconde pendant laquelle la patronne venait demander gentiment un service à son employée.

« Va porter ça à Sejui, vu que tu ne fais rien. Reviens avant une heure pour le dîner. »

L'infecté se redressa et observa la scène en silence, fixant le bocal en haussant un sourcil. Quelle étrange chose. D'ici, on aurait dit qu'il contenait simplement de l'eau terreuse... Quel en était l'intérêt ? Il se releva doucement tandis qu'elle avait posé le contenant en verre sur le sol et s'approchait de lui. Il la remercia d'un sourire en prenant le carnet, commençant à lire les premiers calculs, plissant un peu les yeux. Il supposait qu'ils étaient bons... Après tout, c'était les mêmes résultats qu'avaient trouvé sa mère.

« Êtes-vous satisfait des corrections ? »

Il releva les yeux vers elle et hocha doucement la tête, le même sourire accroché aux lèvres.

« Je pense être moins bon en calculs que vous, alors je vous fais confiance... Et puis vos résultats ont l'air d'être les mêmes que les nôtres. Au moins pour la première page. »

Malgré le ton presque blasé de la jeune femme, Felice s'efforçait de continuer à avoir un air plus avenant qu'elle - chose peu difficile à vrai dire. Il remit le cahier dans la poche intérieure de son blouson et remit ce dernier avec soin. Il reposa son regard sur le curieux bocal, repensant aux paroles de la vieille asiatique. Il fixa finalement la scripte à nouveau et sourit une fois de plus.

« C'est marrant, je crois que je connais un Sejui... En tout cas le nom me dit quelque chose. Il doit y en avoir un à Anayénnisi, mais ça doit pas être le même. »

Il attrapa la lanière de son sac et le glissa doucement en bandoulière.
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